Ces chers pulls irlandais
On connait tous ces fameux pulls, les pulls d’Aran, souvent écrus, avec tous ces motifs de mailles entrelacées : les pulls irlandais. Mais d’où viennent ces chandails si typiques?
J’ai toujours été fan de ces pulls irlandais. J’ai pu dans ma vie de tricoteuse en tricoter quelques uns et j’ai adoré. Gilet barman, pull col roulé, pull en multiples pièces, tout en maille irlandaise. Ce dernier n’est pas fini et fait parti de mes ouvrages « boulet ». 😉 On en a tous un ou deux dans son sac à tricot… Complexité du point, effets matières, diversité des points, tout était là pour me motiver. Mon plus beau souvenir, un superbe pull pour homme, il m’a fallu six mois pour le faire, à tricoter quelques heures chaque week-end. Il faut dire que le gabarit n’était pas des moindres, une très… très… belle carrure à habiller ! Que dire de la fierté qui m’a envahie quand j’ai fait ma dernière maille… Savez vous qu’un chandail fini peut contenir jusqu’à 100 000 mailles ? J’ai fait défiler entre mes doigts ces innombrables mailles sans en connaitre les significations. Alors aujourd’hui, après quelques recherches dans mes livres, sur le web, je partage mon nouveau savoir…
Trop souvent, le pull d’Aran est résumé à un pull en laine écrue à torsades… alors que ce chandail raconte à lui tout seul de belles histoires. Ce sont les histoires de clans, d’identités, de générations, de familles, et du labeur des hommes.
Le pull d’Aran puise ses origines dans les iles d’Aran. Nichées dans la baie de Galway, les îles d’Aran – Inis Mor, (la plus grande) Inis Meáin (l’ile au centre) et Inis Oírr (l’ile à l’est)– sont les dernières terres à l’ouest de l’Irlande avant d’atteindre l’Amérique. Ces îles, qui conservent encore certains aspects de la vie traditionnelle, fascinent toujours autant. Des terres toujours soumises à la dureté du climat, aux vents, aux intempéries, et qui continuent de rendre la vie rude.
Le pull d’Aran
Dans sa version originelle, c’était un pull réalisé en laine brute, non traitée qui gardait sa graisse, la lanoline. Et çà le rendait imperméable. Il pouvait néanmoins absorber jusqu’à 30% de son poids d’humidité avant qu’on se sente mouillé. Matière respirante, la laine permettait de maintenir l’organisme à une température idéale et était très isolante. Cependant, une laine brute reste plus ou moins odorante. Ce pull était réalisé dans des mailles très serrée, cela faisait de lui un pull pouvant faire face à la rudesse du climat, c’était le pull des marins des iles d’Aran.
Auréolé de mythes et de légendes, il se racontait, que, lorsqu’un marin se perdait en mer, et venait s’échouer sur la plage, on pouvait l’identifier par le pull qu’il portait. Triste histoire.
En effet, les femmes des iles d’Aran avaient pour habitude de tricoter des motifs qui avaient leurs significations. Chaque clan, chaque famille arborait à la façon des blasons, des combinaisons de motifs. Et chaque motif avait sa part d’interprétation et de symbolisme.
Les motifs les plus courants :
La torsade : elle représente les cordages des pêcheurs et symbolise la chance.
L’arbre de vie : il symbolise l’unité de la famille et du clan.
Les diamants ou losanges : ils représentent les petits champs de l’archipel avec la mousse (point de blé) à l’intérieur signe de fertilité. Symbole de réussite et de richesse.
Mousse (point de blé) : Il représente l’algue qui a été utilisée pour fertiliser les terres ou les lichens aux vertus médicinales que les Irlandais sont reconnaissants à la mer de leur apporter. C’est un symbole de nature.
Les alvéoles ou nid d’abeille : elles représentent le dur labeur dont sont l’exemple, les abeilles.
Le treillis : Ce sont les petits carrés de terre séparés par des pierres sur l’île d’Aran
Le point de vannerie : pour donner au pêcheur beaucoup de chance de capturer des poissons.
Les zig-zag : représentent les sentiers tortueux de l’île, et symbolise les hauts et bas de la vie conjugale.
Le lien : il correspond à la chaîne ininterrompue entre les Irlandais qui émigrent et ceux qui restent à la maison.
Le point de la Trinité (ou point de mûre ou point d’astrakan) : C’est le symbole de la Sainte Trinité car il se tricote 3 mailles dans une et une maille avec trois… représente aussi les fruits cueillis sur les haies.
Sur le site d’Aran Sweater Market, on peut admirer tous ces jeux de points constituant un chandail et représentatifs des clans auxquels ils sont sont issus.
Ô magie des mailles, Ô richesse de points, Ô combien ces chandails sont magnifiques. C’est par ici.
Aujourd’hui, on trouve des pulls irlandais tricotés main, en réalité bien souvent tricoté à la main mais sur des métiers.
Le pull d’Aran a traversé les décennies. Apparu vers les années 1900 comme articles en vente sur les étals du continent, le pull d’Aran, s’exporte et devient les compléments de revenus des tricoteuses d’Irlande. Chaud et pratique, il reste le pull prisé par temps froid. Aujourd’hui, il se modernise, on le trouve dans des matières nobles, tels que le cachemire, le lin, le bébé alpaga. On le trouve vraiment sous toutes les formes, en super big fil, en couleurs flashy, ou complètement déstructuré. Véritable oeuvre d’art parfois, il garde néanmoins son image de tradition et véhicule toujours ses belles valeurs.
Pour ma part, lorsqu’on choisit de se lancer dans un tel ouvrage, on mesure toute l’ampleur de la tâche. On choisit avec soin son modèle et sa laine. Pas un vulgaire acrylique, s’il vous plait, prenez un beau fil sec, ni trop fin, ni trop gros, qui mettra en valeur ces combinaisons de points. Les heures vont défiler, çà n’est pas rien de réaliser quelques 100 000 points de points croisés, entrelacés… Mais quel plaisir, quelle satisfaction !
Et pour vous donner un aperçu des traditions, petite video !
Pour aller plus loin
Pour en savoir plus, et prendre une bonne dose d’inspiration, suivez ces liens :
Sur le Pinterest de la cabane tricothé, https://www.pinterest.com/cabanetricothe/traditions-style-irlandais/
Et, plus sur :
https://www.pinterest.com/bronwencg/cable/
https://www.pinterest.com/rsgracey/arans-and-ganseys/
https://www.pinterest.com/lesliesneedle/aran-cable-knits/
Pour approfondir les techniques dans les plus pures traditions, quelques références de livres en anglais:
Patterns for Guernseys, Jerseys, and Arans; Fishermen’s Sweaters from the British Isles de Gladys Thompson
Cables, Diamonds, Herringbone: Secrets of Knitting Traditional Fishermen’s Sweaters de Sabine Domnick
Dutch Traditional Ganseys: Sweaters from 40 Villages: With 60 Knitting Patterns de Stella Ruhe
Fishermen’s Sweaters de Alice Starmore
Chantal
8 mai 2015 à 5 h 36 min (Il y a 10 années)Je vous découvre, je vous lis, j’aime. Bravo ! La Rochelle est un peu loin du Nord mais….
La cabane tricothé
8 décembre 2015 à 23 h 14 min (Il y a 9 années)Bonjour ! Mea culpa pour la réponse ! Les notifications ont « buguées »… Je ne pensais jamais aller au Québec et j’y suis allée, et retournée, donc le hasard de la vie, j’y crois ! A bientôt Chantal de La Rochelle !! Merci pour tous !!!
Lucie Drolet
31 janvier 2016 à 1 h 36 min (Il y a 9 années)Très bon article! j’en ai appris des choses!
La cabane tricothé
31 janvier 2016 à 9 h 08 min (Il y a 9 années)Merci Lucie !
Marion
27 octobre 2016 à 22 h 29 min (Il y a 8 années)Merci pour cet article ! Passionnant !
BIANCO Odile
12 décembre 2016 à 12 h 45 min (Il y a 8 années)On m’a dit que sur les manches des pull irlandais, il y avait parfois un bouton pour accrocher une planchette de bois sur lesquelles on plaçait les hameçons. Pourriez-vous m’en dire plus ?
Je dois vous dire que c’est un réel plaisir pour moi de tricoter ce genre d’ouvrage.
Votre article est très très intéressant ! Merci à vous
La cabane tricothé
13 décembre 2016 à 19 h 15 min (Il y a 8 années)Bonsoir Odile, merci ! Je ne savais pas pour les hameçons, mais çà me parait tout à fait judicieux de leur part… leurs pulls sont de vrais oeuvres. J’ai toujours adoré tricoter les points irlandais. çà motive ! 😉
Roselyne
23 février 2018 à 13 h 33 min (Il y a 7 années)J’adore la maille irlandais et quand je tricotais pour un magasin de laine,j’en ai fait beaucoup.Je me sers des différents points pour inventé mes propres modèlesJe suis une inconditionnelle de la maille irlandaise.La sensation de créer est pour moi très importante. Un tricot est une oeuvre d’art.Je contente d’avoir découvert votre site.